Analyse - Selon des analystes, le constructeur de PC préparerait son entrée dans la téléphonie mobile, à la suite de HP et Apple. Des hypothèses qui reposent sur la récente nomination d'un patron de Motorola à la tête de la branche grand public de Dell.
Le leader mondial du PC pourrait prochainement tenter une incursion dans la téléphonie mobile pour ne pas se laisser distancer par Hewlett-Packard et Apple. C'est l'avis d'un analyste expert du secteur sans fil, après l'embauche par Dell de l'ex-dirigeant de l'activité téléphones mobiles de Motorola, Ron Garriques. Le constructeur l'a nommé il y a deux semaines à la tête de sa division grand public.
«Garriques apporte des compétences uniques qui, selon nous, vont être bientôt exploitées par Dell. Il a une très grande expertise du monde sans fil, un secteur dont Dell doit devenir un acteur - et vite - car HP et Apple se lancent sur ce segment de marché clé», écrit Jack Gold, de J. Gold Associates.
Un smartphone pour entreprises et public averti
Racheter un «acteur établi» tel que Palm, et se débarrasser des «composants non stratégiques de son activité», serait avisé pour y parvenir, avance même Gold.
Dell pourrait, selon lui, cesser la commercialisation des PDA non communicants - un marché en perdition - «dans l'année», en s'attachant plutôt à «proposer un smartphone doté de toutes les fonctions demandées par les entreprises et par le public averti, consommateur de haut de gamme (push mail, lecture/édition de documents, multimédia)».
«Dell ciblerait plutôt le grand public et les entreprises avec des produits qui se démarqueraient. Mais ils seraient motorisés par Windows Mobile, pérennisant la relation qui l'unit à Microsoft sur ses portables», détaille l'analyste. «Pour réussir, il ne lui faudra pas seulement des bons produits, mais aussi des partenariats avec des opérateurs pour ces appareils - un domaine dans lequel Garriques a une grande expérience, tandis que Dell n'en a aucune.»
Un marché sur lequel Dell aurait sa place
Le constructeur américain s'est refusé à commenter ce qu'il qualifie de «rumeurs, spéculations et/ou projets futurs», mais d'autres analystes se rallient à la théorie de Gold. «Les barrières à franchir pour créer un smartphone sous Windows ne sont pas si élevées», estime l'expert de Disruptive Analysis, Dean Bubley. Et d'ajouter: «Ce n'est pas comme si Dell manquait de ressources pour y arriver.»
Selon lui, Dell serait plus que le bienvenu sur le marché du smartphone d'entreprise, dans la mesure où des concurrents tels que HTC (fabricant n°1 mondial des smartphones sous Windows mobile, Ndlr) et iMate manquent de force commerciale ad hoc et ne se mettent «pas particulièrement à la portée de la clientèle d'entreprise. Mais Bubley se montre sceptique sur le fait que Dell puisse se rapprocher d'opérateurs, car il n'est pas «habitué, historiquement, à la vente par le canal des opérateurs». Une telle idée constituerait «un revirement complet» de son modèle de vente directe traditionnel.
«Si vous avez un canal de vente pour les smartphones, pourriez-vous justifier de ne pas avoir un canal pour les ordinateurs portables?», se demande Bubley. Il suggère plutôt que Dell pourrait être tout à fait capable de mettre en place «un canal d'envergure sans opérateur».
«Dell devra forcément collaborer avec les opérateurs»
«Étant donné que nombre d'offres pour entreprises [convergence fixe-mobile] vont être relativement indépendantes des opérateurs, puisqu'elles sont sources d'économies pour les entreprises, cela a du sens d'avoir des téléphones à un prix non fixé par les opérateurs», poursuit l'analyste. Mais les autres fabricants «semblent plus hésitants à prendre le risque de tuer la poule aux oeufs d'or», déplore-t-il.
Un avis que ne partage pas Gold: «Si vous voulez vous lancer sur le secteur du sans-fil, collaborer avec des opérateurs est inévitable. C'est bien de vouloir vendre en direct, mais si votre appareil n'a pas été testé sur le réseau d'un opérateur, il ne vous laissera pas l'utiliser. Bien sûr, on peut toujours se servir d'une carte SIM, mais si l'appareil n'a pas été approuvé, l'opérateur peut facilement le désactiver. Même si cette idée est déplaisante, les opérateurs ont vraiment ce pouvoir.»
Et l'analyste de Gold Associates de conclure: «Même Apple, qui compte vendre directement aux utilisateurs finaux, a un partenaire côté opérateurs [AT&T/Cingular aux États-Unis] qui a testé et validé son produit. Alors je ne crois pas que Dell aura d'autre choix que de coopérer avec les opérateurs, peut-être en complément de la vente de ses appareils en direct aux entreprises.»