M. Bruno Thibaudeau, directeur maghreb Canal Overseas: “Une émission sport pour le Maghreb sur canal+”
Lancer un plan de communication et de pub, renforcer les programmes, mieux s’organiser avec les distributeurs, lancer des promotions sur les prix de la carte, Canal+ décide d’une montée en puissance pour une véritable implantation de son offre en Algérie.
Vous vous retrouvez en forte concurrence avec des offres, certes, pas légales mais néanmoins très ancrées dans le marché algérien. Comment gérez-vous cette situation ?
C’est, en effet, une situation que nous gérons en Algérie, mais aussi dans plein d’autres pays. Nous savons que les gens adorent les images, ils veulent voir des chaînes de télévision et à partir de là il faut qu’on trouve le moyen d’y accéder. Alors, en effet, parfois c’est de manière illégale, mais l’essentiel pour eux c’est de regarder la télé. Aujourd’hui, nous pensons que le moment est venu de développer une offre légale aux côtés de celles qui existent déjà comme enrichir le marché avec des offres complètes qui feront disparaître, peu à peu, les offres qui n’ont pas le droit d’être là. En même temps, nous sommes très à cheval sur le contenu parce que nous nous sommes engagés avec nos partenaires comme ne pas diffuser des programmes pour adultes, ce que les offres illégales ne font pas. On va dire que c’est un peu hybride comme période et à nous d’être bons, de trouver les bons prix et les arguments programmes pour se distinguer.
Vous avez récemment enrichi votre offre avec l’introduction de TF1 et M6, ainsi que ma chaîne sport. Mais de l’avis des Algériens, cela reste insuffisant notamment en rapport avec le prix. Qu’en dites-vous ?
Nous sommes toujours à l’écoute avec beaucoup de sérieux, et c’est pour cela justement que nous faisons des efforts en termes de programme en injectant de nouveaux contenus, surtout en sport, nous rajoutons de nouvelles chaînes, nous lançons des promotions tarifaires et ce n’est pas fini. Notre objectif est d’enrichir l’offre et de bien caler le prix. Nous sommes conscients qu’on est cher, même si l’on commence à être abordable. Mais il ne faut pas perdre de vue que si l’on veut mettre de grandes émissions, du cinéma et du sport identiques à Canal+ aux côtés des chaînes arabes gratuites, comme c’est le cas sur ces mêmes satellites, ça coûte énormément cher, donc il faudra trouver le juste milieu et nous allons le faire.
Justement, qu’est-ce qui vous empêche de reproduire le même contenu d’autant plus que les Algériens sont habitués à Canal+ et en connaissent toutes les variantes ?
Vous savez si vous parlez de cinéma, de documentaires et des autres émissions, c’est tout à fait identique. Les seules différences sont les programmes dits adultes, quelques programmes où l’on pense qu’il y a litige sur les mœurs et nous avons même un directeur des programmes qui est algérien, et puis sur le contenu sport. Mais il ne faut pas perdre de vue que nous ne sommes présents que depuis quelques mois, et déjà bien du chemin a été parcouru. Lors du lancement, il n’y avait pas du tout de sport, maintenant nous avons la 1re ligue, du rugby et bien d’autres nouveautés qui vont arriver.
Et à quand la “maghrébisation” des programmes ? Pourra-t-on un jour parler d’une grille spéciale ?
Ah oui là, c’est un vrai sujet. Nous voulons d’abord que notre produit soit pour les Algériens, quasi le même de ce qu’il ont l’habitude de voir de Canal+ France. Nous pourrons, plus tard, réfléchir sur la possibilité d’introduire des émissions spéciales, voire une chaîne spéciale, et c’est une montée en puissance que seul le marché décidera. En attendant, nous sommes en train de préparer une émission sport avec une équipe de journalistes algériens et marocains qui sera renforcée plus tard par des journalistes tunisiens. L’émission se fera au Maroc, dont la production suppose beaucoup d’investissements, mais on y croit fermement. Cette émission aura pour empreinte particulière la présentation de l’actualité sportive internationale avec un regard particulier.
À partir de quel seuil de vente vous estimez-vous rentables ?
La question génère beaucoup de discussions, et ce que je peux dire, c’est que l’Algérie est un grand marché. Il pèse 200 000 ou 300 000 abonnés ou peut-être plus, mais personne n’est en mesure de le dire et l’avenir le précisera. Il demeure indéniable que Canal+ est regardée par de très nombreux Algériens, dont beaucoup ont les moyens d’acquérir la carte. Cela ne sert à rien, d’ailleurs, de dire qu’on a vendu tant de cartes car il est trop tôt pour procéder au bilan. Il faudra attendre un an d’exploitation et surtout de voir la courbe évolutive entre la période du lancement, pendant l’été, l’étape des promos lors du Ramadhan, la rentrée des classes, etc.
Ce n’est qu’en fin février 2010 que nous nous prononcerons, car tous les jours la dynamique du marché nous apprend des choses. La télévision arrive, et il y a comme une espèce d’excitation du marché et de l’activité entre les différents concurrents, et chacun y va de sa petite astuce.
Il existe comme un manque de visibilité de votre produit. Hormis Comagrapgh, les autres distributeurs sont quasi absents sur le plan com et pub. Un commentaire ?
C’est, en effet, le cas. Nous avons d’ailleurs décidé de procéder différemment. Nous allons rencontrer nos distributeurs et débattre d’une nouvelle façon de faire qui va nous impliquer beaucoup plus que ce qui était prévu initialement. En plus de ce que font les distributeurs, Canal+ va investir dans la communication et la publicité à travers l’achat d’espaces publicitaires dans les journaux et les radios et bien d’autres opérations. Nous allons aussi communiquer sur les programmes, sur un prix ou encore sur une opportunité, procéder à l’habillage des boutiques et marquer ainsi plus de présence.
En fait, lorsqu’on se lance dans un projet pareil, il faut être très réactif et rester constamment à l’écoute des uns et des autres et rectifier certaines choses lorsque cela s’avère être nécessaire. Toujours est-il que l’approche change et c’est ce que nous allons discuter avec les distributeurs pour renforcer notre collaboration.
Les distributeurs doivent, eux aussi, investir le terrain, dans les boutiques et instaurer une bonne relation avec le client, lui présenter un bon package et assurer un service après-vente. Il est très important d’acquérir l’expérience du client. Des prestations auxquelles le client n’a pas droit lorsqu’il s’agit de cartes piratées.
Vous êtes également présents au Maroc et bientôt en Tunisie. Quelle appréciation faites-vous de ces marchés ?
Là aussi, c’est encore prématuré pour se prononcer de manière claire et précise même a priori ; nous estimons que le marché marocain et le marché algérien sont pratiquement équivalents en attendant de voir l’évolution des choses. Nous n’avons pas trop de visibilité sur le long terme parce que les gens sont prudents, mais nous sommes contents dans l’ensemble car nous recevons des retours d’écoute de nos clients qui manifestent un réel intérêt.
Les perspectives ?
Nous sommes présents de manière très humble et nous voulons rester, donc nous y allons lentement. Nous voulons, étape par étape, trouver les bons partenaires, les aider et investir dans la communication mais surtout dans les programmes. Nous savons que ce qui importe pour les gens, ce sont les programmes même s’ils doivent payer un peu plus cher. Ils sont convaincus qu’ils achètent un produit avec l’assurance et la tranquillité qu’il s’agit de cartes qui ne présentent aucune mauvaise surprise comme s’arrêter de fonctionner au moment où l’on s’y attend le moins. Nous offrons la garantie d’une offre légale et notre objectif consiste à ce que les clients soient satisfaits de l’offre et du service. Et c’est là un travail à mettre en place en une année ; nous essayerons de trouver tous les moyens de rendre intéressant l’achat de la carte. Hormis la promotion spécial Ramadhan, qui consiste à réduire les tarifs de 40%, il y aura encore plein de surprises.
Source: Liberté