Beaucoup de jeunes se sont spécialisés dans la création de sites Internet en free-lance ou ont créé des sites commerciaux. Quel regard portez-vous sur ce nouveau genre d’investissement ?
La première idée qui vient à l’esprit est le fait que la jeunesse algérienne est dynamique et suit de près l’évolution de la technologie dans le monde. Les nouvelles technologies de l’information sont maintenant source de valeur ajoutée partout dans le monde. Leur poids dans le produit intérieur brut dans les pays développés et émergents est de plus en plus important. Reste maintenant à connaître le profil de ces jeunes et leur degré de spécialisation dans le domaine. Nous pouvons identifier ces jeunes selon leur formation. Il s’agit généralement de techniciens, de techniciens supérieurs, d’ingénieurs et d’ingénieurs séniors. Leur niveau de technicité a un impact sur la qualité de leur travail. Ces nouvelles activités montrent aussi que nous sommes bien dans la nouvelle économie numérique basée sur le savoir. La question qui se pose, cependant, est comment les répertorier, puisqu’il s’agit dans beaucoup de cas de personnes travaillant en free-lance et de façon non officielle. Il est donc difficile d’avoir des statistiques fiables sur leur nombre et leur insertion dans le marché du travail. Le type de contrat signé avec les entreprises (publiques ou privées) ou les organismes étatiques, ainsi que leur part dans la soustraitance, peuvent être des éléments très importants dans l’appréciation de leur travail.
Quels sont les risques inhérents à ce genre de métiers ?
Les jeunes qui travaillent dans l’informel ne peuvent avoir la possibilité de se développer et de se hisser au niveau de réelles entreprises créatrices de richesses et d’emploi. Un problème susceptible d’être surmonté avec l’intervention des autorités qui pourraient mettre en place des formules permettant d’intégrer ces acteurs dans le circuit formel. L’Etat doit donc réguler ces nouveaux marchés. D’autre part, l’administration publique doit changer d’attitude et essayer de suivre de près ces évolutions. Un autre risque est lié à la qualité de service et le service après vente. S’ils ne se constituent pas en sociétés, même individuelles, le doute planera toujours sur leur degré de professionnalisme.
Pensez-vous que les changements apportés par les nouvelles technologies auront un impact significatif sur le paysage économique algérien ?
Chaque révolution apporte avec elle son lot de changements. Nous sommes dans l’ère de la révolution numérique. Certes l’Algérie est un peu à la traîne, dans ce domaine, par rapport aux autres pays émergents. Mais la possibilité de se rattraper est grande. L’exemple le plus édifiant est la téléphonie mobile. En huit ans, le paysage de la téléphonie s’est complètement transformé. Pour l’utilisation des nouvelles technologies, il faut surtout développer des services à grande valeur ajoutée sur le Web. Le e-gouvermnet est la solution idéale pour booster ce domaine. La dernière crise de liquidité dans les bureaux de poste a montré clairement que chaque retard dans l’adoption de ces technologies a des conséquences négatives sur l’économie nationale et même sur le moral de la population. Le changement que peuvent apporter ces nouvelles technologies est indéniable. Il faut juste regarder comment ces technologies ont facilité la vie à plusieurs millions d’habitants à travers le monde. L’administration publique devient plus proche du citoyen et plus efficace. Les transactions économiques qui passent par le circuit bancaire sont identifiées, ce qui minimise le poids de l’informel dans l’économie nationale. Un autre aspect, qui n’a pas trait au paysage économique mais a un impact significatif sur l’acquisition du savoir, est l’enseignement à distance. Son impact est non négligeable sur la formation du capital humain. Le projet e-Algérie est sans doute un pas impressionnant dans la concrétisation de cette démarche. Le défi à relever est la sécurisation des réseaux et l’algérianisation du contenu et l’adaptation de l’administration publique, habituée aux méthodes de travail archaïques.
Entretien avec M. Khaled Menna, économiste
« Les nouveaux métiers des TIC doivent être régulés par l’Etat »
N'TIC 50 / DECEMBRE 2010