Programme Cyber Rif: comment aller au-delà du conjoncturel ?

Il y a presque une année, l’opération « Cyber Rif » était lancée à partir du Palais de la Culture Moufdi Zakaria à Alger en plein SIFTech.

Officiellement, il s’agit d’une opération pilote dont l’objectif principal est de faire découvrir, particulièrement aux populations rurales, toutes les possibilités offertes par Internet et les outils numériques. Le but est de faire accéder ce type de population au Web pour leur permettre de mieux le connaître mais surtout de découvrir les multiples applications qu’il permet. En d’autres termes, c’est un programme de formation itinérante à l’aide de fourgons ou de bus équipés de micro-ordinateurs avec accès à Internet par satellite. Mais cette opération a-t-elle réellement eu les effets escomptés au-delà des feux de la rampe médiatique ?

Les ruraux en ont-ils vraiment bénéficié ou ne s’est-elle réduite qu’à une simple caravane de passage pour mettre un peu d’ambiance ? L’équipe de formateurs présents possède les compétences adéquates pour manipuler les équipements installés dans le fourgon qui a une autonomie totale : il peut atteindre n’importe quel village, grâce à son antenne satellitaire de 1.20 m. Elle se déplace avec le bus pour encadrer des cybernautes et leur permettre de se connecter à des sites instructifs et éducatifs.

Objectif : le désenclavement technologique

Mais si cette initiative est louable, plusieurs témoignages ont mis en évidence son caractère temporaire. D’autre part, notent les observateurs, qu’adviendra-t-il lorsque l’opération sera terminée ? Les ruraux concernés convertis le temps d’une journée aux bienfaits du multimédia pourront-ils avoir accès après à une bonne connexion ou à une connexion tout court ? La réponse est franchement NON car on constate que même dans les grandes villes, la connexion n’est pas toujours assurée et lorsqu’elle est établie, le débit est trop lent pour plonger comme il se doit dans l’univers d’Internet. Alors dans ce cas, on serait tenté de croire que l’opération Cyber Rif est une opération tape à l’oeil qui, certes fait découvrir Internet, mais ne se limite qu’à cet aspect. Cela ne reste ni plus ni moins qu’un projet initié par le Ministère de la Poste et des Technologies de l’Information et de la Communication et confié au groupe KRIZALID Communication.

Pour le Ministre du secteur, Moussa Benhamadi, Cyber Rif est un pas supplémentaire vers la concrétisation du programme e-Algérie. Mais qu’en pensent les Algériens qui vivent dans des régions isolées ? Des régions qui pour certaines ne sont même pas dotées de lignes téléphoniques fixes. « Je vis personnellement dans une région isolée et on constate un manque d’information flagrant ! Personne ne sait quand la caravane Cyber Rif va passer dans nos régions! Même pas les médias! », souligne un internaute
sur un site de discussion.

« Sérieusement, on aurait préféré un coup de pouce pour les maisons de jeunes en les équipant d’une connexion à 2 Mo, voire 20 Mo, étendre le même réseau en WiFi pour les adhérents afin de couvrir certains villages, au lieu de lancer une opération ponctuelle telle que Cyber Rif », déclare encore Yazid, 30 ans, vivant un village près de Bouira.

A travers tous les dires que nous croisons sur Internet, nous voyons bien que cette opération ne fait pas l’unanimité. Elle aura des effets ponctuels certes mais une fois terminée, les zones en question se retrouveront au point de départ, c’est-à-dire des territoires où Internet est exclu et où la fracture numérique est toujours présente. Le mode de vie simple et routinier de la plupart des ruraux ne justifiait jusqu’alors tout simplement pas un accès régulier à Internet. Les gens se contentaient des nouvelles et de l’accès à l’information que leur offraient les journaux, la radio et la télévision. Ils avaient peu d’intérêt pour l’élargissement de leurs sources d’informations.

Cependant, cette situation est en train de changer. La preuve, la fréquentation des cybercafés pas seulement pour surfer sur le Web, mais aussi, et surtout, pour communiquer avec les proches grâce à la téléphonie par Internet, beaucoup moins coûteuse que les appels conventionnels.

Kamel RAHMOUNI