On dit que les plus grandes révolutions sont silencieuses, l’impression tridimensionnelle fait partie de ces changements qui s’infiltrent à notre insu dans la société humaine. Vous ne faites pas une overdose de science fiction, les décors de cette histoire ne se situent pas dans des studios hollywoodiens, mais bien dans les couloirs des plus grandes universités du monde. Car l’impression 3D a prouvé qu’elle pouvait rendre obsolètes nos méthodes de production et amorcer un nouveau virage créatif.
Ses domaines d’application vont de la gastronomie à l’art en passant par la médecine, où des pionniers aventureux creusent les filons de cet Eldorado technologique. Les grandes firmes se ruent aussi sur cette opportunité d’accaparer un marché prometteur, en happant toute nouvelle découverte afin de déposer des brevets à foison. L’impression 3D présente aussi un intérêt pour les particuliers qui veulent créer leurs propres objets, s’affranchissant ainsi de la dictature commerciale des multinationales.
Comment cela fonctionne ?
L’impression 3D ne diffère pas foncièrement de sa cadette bidimensionnelle que nous connaissons tous. Elle suppose simplement la superposition de plusieurs couches de matières imprimées de manière traditionnelle.
Tout d’abord, on passe par la case créative en utilisant un logiciel de conception assistée par ordinateur, où les artistes pourront donner libre court à leur imagination. Puis, il faut utiliser un second logiciel qui convertira ces données, pour conceptualiser une forme viable d’assemblage de couches 2D, compréhensible par l’imprimante. Afin d’être plus explicite : on conçoit en 3D puis on traduit en 2D et enfin on réalise l’objet selon sa forme originale.
Quant à l’impression, elle peut être réalisée selon plusieurs méthodes nées du bourgeonnement des laboratoires de recherche sur cette technologie. On parlera de FDM qui consiste à accumuler des couches de matière fondue à une température de fournaise, de SLA qui utilise un rayon UV pour donner une consistance solide à la matière superposée.
Dans ces divers procédés, les matériaux les plus courants sont les plastiques (ABS, PLA,…). Mais l’expansion de l’impression 3D ouvre la voie à l’usage d’un grand nombre « d’encres » : métaux tels l’or ou l’argent, résine, céramique ou cire. Il est pour le moment impossible de réaliser des composants électroniques très complexes dû aux matières qui les composent, mais nul doute que ce frein sera vite levé à mesure que la recherche progressera.
Le temps d’impression varie selon la taille de l’objet et le procédé utilisé. Pour les moins complexes, quelques heures suffiront afin de former la structure de l’objet sous sa forme définitive.
Les applications bénéfiques pour la santé
La technologie est parfois reconnaissante envers les mains qui l’ont façonnée. C’est le cas de la 3D printing. En effet, la médecine fut l’un des premiers domaines d’utilisation de cette innovation. En 2002, le Wake Forest Institute for Regenerative Medicine crée le premier rein artificiel et fonctionnel conçu par une imprimante 3D. Il parvient à remplir son rôle et sert lors d’expériences sur les animaux. De nos jours, on conçoit des répliques d’os et des implants dentaires personnalisés, avec une précision capable de rendre aux patients leurs dentitions d’antan.
Il y a quelques jours, une équipe de chirurgiens américains devait opérer le cœur d’un nourrisson mais éprouvait des difficultés à visualiser l’organe dans son ensemble. A partir des radios, il a été possible d’en réaliser plusieurs répliques avec une imprimante 3D, ce qui a permis aux médecins de cibler précisément leurs coups de bistouri et de sauver l’enfant.
Enfin, la plus grande prouesse de cette technologie est peut être encore à venir. Il s’agit d’utiliser du tissu humain pour imprimer des organes, vaisseaux ou appareils complets ! Il s’agirait d’un pas énorme dans la recherche médicale, qui sauverait la vie de très nombreux patients et changerait la totalité du système de santé actuel !
L’art en serait révolutionné
Les limites de la maniabilité humaine pourraient s’effondrer devant la redoutable précision des imprimantes 3D. Plus besoin de concevoir un robot ultramoderne et cher pour réaliser des pièces minutieuses, un simple clic et votre plan prendra forme en quelques heures.
Ceci peut intéresser les sculpteurs et autres artistes modernes qui pourront coller à la réalité les images projetées par leurs esprits féconds, en se concentrant sur l’idée pour laisser le côté physique de l’ouvrage à la machine. Lors de la Fashion Week de Paris, on a même pu apercevoir un défilé de robes fabriquées grâce à une imprimante 3D. Une véritable séparation déjà amorcée par la robotique mais qui confirme la tendance : l’homme n’est plus qu’une boîte à idées.
Côté gastronomie, on envisage dès à présent des imprimantes à aliments, capable de produire les plats que vous souhaitez consommer. Des start-up se lancent dans la conception de steak synthétique ou de pièces originales de chocolat à travers ce procédé.
D’un point de vue esthétique, on ne peut que saluer les progrès concrétisés, mais il faut aussi souligner l’économie en temps, en argent et en matière première que cela occasionnera. Il sera possible au particulier d’ajuster sa consommation à ses besoins, de remplacer les composants de son ordinateur et limiter les dépenses superflues en emballage et production de masse.
Une refonte de l’économie moderne
Au-delà de ses applications ciblées, l’impression 3D rend obsolètes toutes les lois qui régissent les chaînes de production, court-circuitent l’ingénierie et les méthodes industrielles traditionnelles. Que faire d’une chaîne de montage quand l’imprimante peut assembler l’ensemble du produit (outil informatique, meuble, accessoire,…) d’un seul jet ?
Alors que les hologrammes sont encore vus comme des tours de magie technologiques, un tel saut greffant une dimension à notre champs de création fait le bonheur des sur-humanistes et autres partisans d’un humain ultra-connecté individualisant son rapport à la technologie.
Cela pose aussi la question de la dépendance aux produits dérivés du pétrole, car l’encre la plus utilisée est faite de fibres de plastique. A l’heure où on cherche des solutions alternatives au pétrole, il se trouve être une ressource indispensable à cette nouvelle technologie. Là encore, l’homme se creuse les méninges et semble sur la voie de trouver des encres différentes. On parle d’utiliser des céréales et des résines naturelles.
La face cachée de cette révolution
Chaque médicament possède une liste d’effets indésirables, négligés par rapport aux bienfaits du traitement. L’impression tridimensionnelle aussi a des impacts négatifs, qui devront être pris en considération dans le futur.
Tout d’abord, elle émet des microparticules nocives et parfois même cancérigènes, ce qui rend son utilisation fort déconseillée en milieu clos. Ces émissions sont mineures et en endroit aéré, elles ne peuvent causer de troubles à la santé. L’Illinois Institute of Technology recommande tout de même qu’une large étude soit menée, afin d’éviter que des nuages troublent l’horizon clairvoyant de cette technologie prometteuse.
La question de la propriété intellectuelle se pose aussi. Il sera possible à n’importe qui de copier les produits d’une société sans aucune régulation. A partir de chez soi, à condition de mettre la main sur les plans 3D, on pourra reproduire les produits des grandes marques sans passer par la chaîne classique d’achat.
Alors, allons-nous vers un monde où les grandes entreprises nous vendront leurs marchandises sous forme de fichiers qu’on imprimera soi-même ? Comment dès lors empêcher le piratage et la propagation illicite de ces fichiers ? Comment reconnaître la contrefaçon des originaux ?
L’utilisation d’une imprimante 3D peut donc se révéler problématique. Un étudiant texan a par exemple réalisé une arme à feu grâce à une imprimante 3D. Il a même réussi à tirer quelques coups de feu. Il poussa alors l’audace jusqu’à partager les plans de son arme. Avant que le gouvernement américain ne puisse les faire retirer, ils avaient déjà été téléchargés plusieurs milliers de fois.
Quel futur pour l’impression 3D ?
L’impression 3D est déjà la préoccupation des grandes entreprises High Tech. De nombreuses start-up se sont aussi spécialisées dans le domaine afin d’investir un terrain encore vierge. Il est possible de se procurer une imprimante 3D selon son budget, les prix variant autour de quelques milliers d’euros. Bien entendu, les particuliers n’ont pas accès à toutes les possibilités qu’offre l’impression, devant se contenter d’un type de matériaux restreint et d’objets de petit volume.
Dans le même temps, la recherche fait des progrès prodigieux, réalisant nos fantasmes les plus audacieux. Un laboratoire de recherche américain a même créé des imprimantes 3D capables de se reproduire à l’infini en imprimant leurs composants. Rien ne semble arrêter les portes drapeau de l’impression 3D, qui comptent comme grand soutien Barack Obama qui a souligné son importance et accordé des fonds pour soutenir la recherche, sans pour le moment songer à ses dérives.
C’est donc tout un cadre juridique qu’il faudra instituer afin de réguler les applications futures de ces machines au potentiel démesuré, tout aussi destructeur que salutaire. Encore une fois, c’est l’utilisation que l’humanité fera de la technologie qui statuera sur son avenir, rappelant le débat autour de l’usage du nucléaire. Car si l’atome existe depuis la nuit des temps, la bombe atomique, elle, est née avec l’homme.