Malgré l’interdiction de leur utilisation dans les établissements scolaires, les téléphones portables sont devenus une véritable hantise pour les enseignants et les professeurs. Les plus redoutés de ces appareils sont ceux équipés de caméra.
Outre qu’ils soient gênants dans la classe lorsqu’ils ne sont pas éteints, ces portables sont souvent utilisés par certains élèves pour filmer, parfois dans des situations embarrassantes, son prof, sa petite amie ou le copain de classe. Ces images volées sont ensuite diffusées partout y compris sur You Tube. Certes, il ne faut pas généraliser mais, selon de nombreux professeurs interrogés, rares sont les établissements qui n’ont pas connu de telles histoires. L’année dernière à Boumerdès, l’enseignante d’un lycée a eu la surprise de découvrir son image sur Internet, alors qu’à Oran, une lycéenne s’est retrouvée sur You Tube en train de discuter avec sa copine de classe. Autre exemple de cette professeure à Réghaïa vêtue d’une jupe filmée à son insu en train de ramasser la craie. À Si Mustapha, dans la wilaya de Boumerdès, un surveillant général du CEM a déposé une plainte contre trois élèves accusés d’avoir fait un clip sur lui et sur l’établissement.
Les élèves, qui ont crié leur innocence, ont été sanctionnés et l’affaire a été portée devant le tribunal de Bordj Ménaïel. L’année dernière, trois lycéens du lycée Lotfi à Oran ont été expulsés de leur établissement pour avoir filmé leur professeure dans une position incommode et drôle à la fois. Les trois lycéens n’ont pas trouvé mieux que de mettre une chaise cassée au bureau de leur enseignante. Celle-ci est tombée dès qu’elle s’y est assise. La scène est filmée à l’aide d’un téléphone portable pour être montrée ensuite à tous les copains de l’établissement. Mais les scènes filmées ne font pas souvent rire. Certaines images volées sont à l’origine de graves problèmes. Des images choquantes sur des professeurs et des élèves sont diffusées souvent sur You Tube.
Des professeurs et des enseignants rencontrés admettent qu’ils ne sont pas à l’aise dans la classe avec trop de téléphones portables dans les cartables. “Nous redoutons surtout les téléphones équipés de caméra”, affirme un enseignant du lycée El-Khalifa de Boumerdès. Le directeur du CEM du centre-ville est du même avis. “Il y a de plus en plus de téléphones portables sophistiqués, et cela nous oblige à prendre certaines dispositions pour éviter des problèmes”, indique ce responsable, qui avoue avoir confisqué à plusieurs reprises des portables contenant des images inconvenantes prises dans l’établissement. De nombreux responsables de l’éducation reconnaissent l’utilité du téléphone. “Nous comprenons également ces parents qui veulent êtres rassurés et qui tiennent à ce que leurs enfants soient équipés de portables, mais nous les conseillons de sensibiliser leurs enfants sur l’usage de ces appareils”, précise le responsable d’un collège. De nombreux enseignants disent rencontrer des problèmes avec le téléphone portable de leurs élèves. “Ces appareils sonnent parfois en plein cours, d’autres envoient des SMS pendant les cours et cela nous gêne énormément”, indique un enseignant du lycée Chaffaï de Bordj Ménaïel qui ne manque pas de souligner que le portable est souvent utilisé pour “le copiage pendant les examens”. Mais ce que redoute notre interlocuteur, c’est de s’en servir comme caméra pour filmer des élèves ou des enseignants. Il nous cite l’exemple de ces deux lycéens jugés par le tribunal criminel de Boumerdès pour avoir montré à d’autres élèves les images de l’attentat terroriste perpétré en 2007 au Figuier et qui a coûté la vie à un gendarme. Il y a lieu de souligner qu’une circulaire datant de 2007, émanant du ministère de l’Éducation, interdit l’utilisation du téléphone portable dans les établissements scolaires.
On s’interroge si cette circulaire, qui ne donne pas assez de détails ni de précisions sur “l’utilisation de ces appareils” n’est pas dépassée. Surtout lorsqu’on sait que la technologie a trop avancé depuis 2007 et qu’il y a de plus en plus d’élèves qui possèdent un téléphone portable. Des enseignants rencontrés à Boumerdès et à Alger estiment que 30% des collégiens et 50% des lycéens ont un téléphone portable, et 50% de ces appareils sont équipés de caméra.
Source: Liberté