L’Algérie compte actuellement 3 opérateurs (Djezzy, Mobilis et Ooredoo) avec un parc d’abonnés global (GSM et 3G) de l’ordre de 45 millions d’abonnés. C’est un succès indéniable en termes de pénétration de marché et d’engouement de la part de la population mais se pose rapidement la question des enjeux à la fois sociaux, économiques, industriels et d’aménagement du territoire qui en résultent.L’histoire du développement des réseaux mobiles en Algérie fut longue et difficile avec plusieurs étapes importantes.
Période de 2000 à 2008
Cette étape concerne la libéralisation du marché des télécommunications issu du monopole issu d’Algérie Telecom, la mise en place de l'Autorité de Régulation de la Poste et des Télécommunications (ARPT) en 2000 pour en assurer le suivi et l’ouverture du marché à deux nouveaux entrants (Djezzy et Ooredoo) pour le développement de la 2G. N’ayant aucun constructeur de terminaux et de réseaux, le succès fut tout de même assez fulgurant et a permis à l’Algérie de rapidement entrer dans l’ère des réseaux mobiles orientés voix. Le modèle utilisé est principalement celui du prépayé en raison d’un système de paiement défaillant et permet à chacun (opérateurs et usagers) de trouver son compte.
Période de 2009 à 2015
Cette période concerne l’après 2G avec un retard très important de l’Algérie dans l’ère des données mobiles. Alors que beaucoup de pays commencent à déployer la 3G en 2000, l’Algérie envisage l’après 2G en 2009-2010 à un moment où beaucoup de pays se mettent sur la 4G. S’ensuit un débat interminable avec des enjeux techniques et économiques sur l’opportunité de faire un saut de génération de la 2G à la 4G. Plusieurs raisons sont mises en avant pour faire durer les discussions de manière inutiles et qui bloquent la mise en place d’enchères 3G/4G : le cas Djezzy qui se solde par la reprise par l’Etat algérien de la majorité de l’actionnariat de l’opérateur Orascom Telecom Algérie-Djezzy, le fait que plusieurs opérateurs avaient déjà pré-investis sur du matériel 3G et un passage 4G aurait eu un cout important, le fait que la 4G serait en concurrence frontale avec les offres ADSL d’Algérie Telecom et ses conséquences sur l’emploi, le fait que les terminaux 4G seraient chers et non disponibles immédiatement, les questions économiques autour de la couverture en données au vu de l’immensité du territoire algérien, le manque de contenus algériens pour utiliser le potentiel du haut débit mobile et un manque flagrant de moyens de e-paiement. Il est clair que le dossier de l’après 2G a été très mal géré par les acteurs concernés et a fait perdre plus de dix ans à l’Algérie pour entrer dans l’ère du numérique mobile. En particulier, l’Algérie s’est retrouvée dans les derniers des classements mondiaux pour les TIC avec une incompréhension totale de nos partenaires économiques pour un pays considéré comme riche. Cela a également retardé le développement d’un eco-système permettant de se « frotter » à ces nouvelles technologies pour faire entrer les différents acteurs économiques (banques, administrations, etc) dans l’ère du numérique mobile. La décision qui a résulté de cette période d’incertitude a abouti finalement à un déploiement de la 3G fin 2013 mais comparativement à d’autres pays, les forfaits 3G sont encore considérés comme relativement chers par les usagers. Cela ne permet pas l’effet escompté d’une utilisation massive de l’internet mobile avec un développement de contenus et de services de faibles qualités et quantités. Tout ceci n’a eu que très peu d’impact sur le développement économique.
Période à partir de 2016
Cette troisième étape commence avec la mise en place des licences 4G et l’entrée de l’Algérie dans le monde du très haut débit mobile. Les forfaits annoncés, alignés sur la 3G, ne permettent pas et ne permettront pas une utilisation du type ADSL sans fils mobiles. Cela est vraiment dommage. Ceci sans parler du retard toujours colossal dans des systèmes de e-paiement alors que beaucoup de pays ont trouvé le cadre adéquat en fonction de leur lois (le cas de la Chine avec le système de paiement au sein de Wechat est de ce point de vue édifiant). L’Algérie se retrouve une fois de plus à la traine (parmi les derniers pays africains) et cela est d’autant plus inquiétant que le vrai déploiement de la 4G ne débutera que l’année prochaine et qu’en parallèle des annonces pré-5G se feront en 2017 dans le monde. L’Algérie risque une fois de plus de perdre la bataille des réseaux mobiles, sans parler d’une mauvaise utilisation des retombées économiques possibles. L’internet des objets, les smart cities, le big data, le cloud et les industries verticales sont des enjeux importants des réseaux mobiles 4G+ et aucun acteur ne semble prendre la mesure de la prochaine révolution numérique qui nous attend. Il manque également une cruelle vision des forces et faiblesses de l’Algérie dans ce secteur pour ré-orienter les investissements dans nos atouts en mettant en place des priorités. La période de l’après-pétrole doit être également réfléchie à l’aune de la 4G et 5G. Cela est complètement absent du débat.
Quel est l'avenir des réseaux mobiles en Algérie ?
La prochaine révolution des réseaux autour de la 5G arrivera en 2020-2022. Elle aura un impact encore plus important que les générations précédentes (qui se focalisaient sur l’utilisateur et qui posaient semble-t-il beaucoup de problèmes en Algérie pour les questions de contenus/moyens de paiement) sur le développement économique industriel dans la mesure où elle se focalise sur les objets (véhicules connectés, Industrie 4.0, etc) et non plus uniquement sur les hommes. D’ailleurs, les pré-requis de la 5G ne sont plus uniquement autour du très haut débit mais de la connectivité massive (bas débit), la latence (pour permettre une réactivité plus rapide du réseau pour le monde automobile) et la consommation d’énergie. L’échéance pour le pays est très courte (autour de 5 ans) mais nous avons là une opportunité unique de revenir dans la course des nations portées vers le numérique.