Crise financière mondiale: Les NTIC pas encore ébranlées

Les cabinets spécialisés révisent à la baisse leurs prévisions de croissance du marché des nouvelles technologies de l'information et de la communication pour l'année 2009, sans pour autant envisager de scénario catastrophique. Les grandes multinationales continuent d'afficher des scores financiers pas encore négatifs, tout en procédant à des restrictions de coûts entraînant souvent des suppressions d'effectifs.

L'actualité économique  apporte chaque jour de nouvelles confirmations de la profondeur de la crise financière mondiale qui tend à se mouvoir en crise économique  et à s'installer pour une période  que les experts n'arrivent pas encore à délimiter en dépit des multiples plans de sauvetage initiés par la plupart des pays développés , à coup de faramineux investissements consentis avec de l'argent public. Atténuation des effets,  fin de la récession ou encore redémarrage, quelque soit le pronostic, la plupart des analystes tablent sur l'année prochaine pour voir plus clair.
Cette crise financière est au cœur des débats depuis la chute de Lehmann Brothers aux Etats-Unis le 15 septembre 2008. Depuis, cracs boursiers, chutes des actions, les établissements financiers tremblent, les entreprises commencent à sentir les conséquences d'une récession accélérée et les ménages deviennent moroses. Malgré le pessimisme ambiant, le secteur des nouvelles technologies de l'information et de la communication continue sa progression avec des évolutions inégales selon les secteurs d'activité mais une balance globalement en faveur d'une poursuite de la croissance même avec des chiffres juste au dessus du zéro.
Parmi les cabinets spécialisés dans les études prospectives du secteur des nouvelles technologies de l'information et de la communication, IDC et Gartner Group viennent de réviser  une nouvelle fois à la baisse leurs prévisions pour l'année 2009. Semaine après semaine, les prévisionnistes prennent la mesure de l'ampleur de la crise dans laquelle s'enfonce l'économie mondiale. Les dernières estimations, tant d'IDC que du Gartner Group, dessinent un avenir plus sombre qu'auparavant. Si, selon eux, le marché mondial des TIC n'en est encore qu'à vaciller, celui des semi-conducteurs s'effondre.

Mi-janvier,  Gartner tablait, sur une année étalée (+0,16%) pour les budgets des services informatiques. Tout récemment, IDC qui, en novembre, prédisait pour 2009 une croissance mondiale des TIC de 2,6%, évoque désormais un petit +0,5% qui donnerait un marché de 1,44 millier de milliards de dollars. Mi-janvier, le cabinet Forrester avait aussi annoncé une récession mais il soulignait le rôle de l'inversion des taux de change dans ce phénomène. Avec une chute annoncée de 3,6%, la baisse des ventes de matériels va plomber l'ensemble du secteur. La hausse de 3,4% prévue pour le logiciel et les services compense à peine cette récession. Notons qu'IDC  prévoyait  encore en novembre  pour une hause  de 4,9 % pour le logiciel  et de 3,7% pour les services. Par rapport aux précédentes prévisions, le marché américain ne croîtra plus de 0,9%, mais de 0,1% à 491 Md$. Le marché de l'Europe de l'Ouest passe de +1,2% à +0,1%. Ce dixième de point de croissance proviendra des marchés anglais et allemand alors que ceux de la France et de l'Italie tomberont en récession. Ceux d'Europe centrale vont s'effondrer (-7,5%).A l'exception du Japon (-1,8%) les marchés asiatiques se maintiendront en croissance (+1,4% au lieu de +4%) grâce à la Chine (+6,5% au lieu de +9,1%) et à l'Inde (+5,7% au lieu de +10%). Au sujet de  ce marasme mondial, deux régions paraissent préservées selon les bureaux d'études spécialisés : l'Amérique du sud, avec une prévision de +4% (+8% prévu en novembre) tirée par la locomotive de l'économie brésilienne (+6%, au lieu de +9%) et le Moyen-Orient et l'Afrique où la demande des pays producteurs de pétrole maintiendra la croissance à +8%. Plus lié à la consommation grand public, le secteur des semi-conducteurs sombre de plus en plus profondément. IDC anticipe une chute de 22% de l'activité, après une baisse de 2% en 2008. Quant au Gartner Group, qui annonçait -16% sur 2009 en décembre dernier, il prévoit désormais -22% et n'exclut pas -33%.

Sans doute conscients de leur rôle dans la détermination du moral des acteurs, IDC et Gartner évoquent du bout des lèvres, à l'instar de beaucoup d'autres centres d'observation de la crise mondiale, une reprise possible en 2010. Dans ce contexte de doute et d'angoisse pour les patrons, certains d'entre eux continuent pourtant à voir la vie en rose. A l'instar de celui de Google, M. Scmidt,  dont  l'entreprise pourrait, selon un quotidien français,  « avoir amassé 21 milliards de dollars (16,6 milliards d'euros) d'ici à fin 2009 ».
Google dispose actuellement d'une manne de trésorerie de 16 milliards de dollars. Comme M. Schmidt a indiqué qu'il n'y toucherait pas cette année, ce « bas de laine » va encore s'arrondir. Si la poule aux œufs d'or continue de pondre le résultat d'exploitation s'est élevé à 7,9 milliards de dollars en 2008, les coffres renfermeront quelque 21 milliards de dollars fin 2009. Et si, de surcroît, l'entreprise maintient la politique d'investissement parcimonieuse qu'elle pratique depuis plusieurs trimestres, le trésor de guerre s'en trouvera augmenté d'autant. M. Schmidt a par ailleurs fait savoir que « les dépenses de l'entreprise baisseraient » et que, par ailleurs, il ne voyait pas « comment le chiffre d'affaires pourrait diminuer » Cette politique prudente de thésaurisation intrigue en tout cas les analystes qui s'interrogent sur les visées stratégiques de Google qui n'a pas dévoilé de plan de mobilisation de ce  « trésor de guerre » Entre d'hypothétiques acquisitions de sociétés concurrentes, que les autorités de régulation ne sont pas prêtes à accepter facilement, pour des raisons d'équilibre du jeu de la concurrence et la tentation de céder aux attentes  des actionnaires par une généreuse distribution de dividendes, les jeux ne sont pas encore faits.
Autre mastodonte sur le marché,  Microsoft affiche un certain optimisme pour le futur des TIC dans un climat pesant  et parvient malgré tout à garder le moral et à rester serein se voulant rassurant pour l'avenir à court terme du secteur informatique. C'est ainsi que, selon l'AFP, Steve Ballmer, PDG de Microsoft indique à ce sujet : « Notre secteur n'est pas immunisé contre ce qui se passe dans l'économie mondiale (...) mais, malgré les circonstances actuelles, on voit un marché qui se tient. » Pour lui, « l'économie reste dans un état correct », ce qui est « de bon augure pour l'informatique. »

Il met par ailleurs en exergue l'action qu'exerce l'amplification du phénomène médiatique sur le moral des gens : « En tout cas, pour le moment, les gens avec qui je parle dans notre secteur se sentent mieux qu'on ne le ferait si on passait toutes nos journées à regarder (la chaîne de télévision économique CNBC. »
Les technologies de l'Information et de la communication semblent aussi être l'une des priorités sur lesquelles le géant souhaite se focaliser en 2009, en capitalisant sur des services tels que Windows Live, et en investissant la moitié de ses fonds de développement et de marketing sur les produits grand public et Windows Mobile. Microsoft vise donc prioritairement la convergence PC/téléphone en passant par le Web.


La chasse aux coûts

Le relâchement de la demande des consommateurs  pousse les sociétés de technologies et de l'Internet à agir avec précaution. eBay, le site de vente aux enchères  vient ainsi d'annoncer une réduction de 10 % de sa masse salariale, Hewlett-Packard table sur le licenciement de plus de 24 000 employés. De son côté, Microsoft va revoir à la baisse ses prévisions de recrutement pour 2008-2009. Même Google voit la progression de son chiffre d'affaires (à 99 % issu de la publicité) s'essouffler : + 39 % au second trimestre sur un an, contre + 59 % en 2007. Dans ce contexte, les capital-risqueurs ne cachent plus à leurs jeunes pousses que leurs chances de survie se mesureront à l'aune des économies qu'elles parviendront à réaliser.

Un mastodonte quitte la Chine

En raison de la crise financière, AOL a décidé de supprimer tous les services en Chine continentale. Filiale internet du groupe Time Warner, le groupe compte supprimer 700 postes dans le monde jusqu'à fin mars 2009. Selon les responsables  d'AOL, le groupe est incapable de supporter les frais excessifs de l'équipe AOL Chine ; 100 employés vont donc être licenciés. Ce fut la deuxième tentative échouée d'AOL pour entrer dans le marché chinois. En 2001, AOL et Lenovo ont créé une joint-venture représentée par le site portail FM365.com ; Dans ce projet, AOL avait investi cent millions de dollars, Mais, la joint-venture a fait faillite en 2004.
La deuxième débâcle d'AOL a commencé en avril 2008, lorsque le géant américain  des contenus multimédia  voulait concurrencer les grands portails. D'après le vice-PDG d'AOL Chine, Gu Haiming, la raison principale de cet échec est dû au plan trop "ambitieux" planifié en début d'année.  Certains éditeurs révèlent aussi que le travail de l'équipe n'a pas été à la hauteur des exigences de la maison mère, non seulement pour ce qui est du contenu éditorial, mais également en ce qui concerne le marketing.

Source: El Moudjahid