Ce qui n'était un secret pour personne vient de se voir confirmé officiellement par la décision des États-Unis de placer l'Algérie, le Canada et l'Indonésie sur leur liste noire des pays protégeant mal les droits de propriété intellectuelle, ou ce qu'il est convenu d'appeler le copyright.
Cette « liste de surveillance prioritaire » est expliquée, du côté américain, par « l'inquiétude quant à la nécessité persistante d'une réforme du droit de la propriété intellectuelle, ainsi qu'à une application insuffisante de la loi », peut-on lire en substance dans un communiqué des services du représentant américain au Commerce extérieur (USTR). Si, pour le Canada, cette présence sur la « short list » sonne comme un rappel à l'ordre dû à son incapacité à ratifier et appliquer les traités de l'internet de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle» (une agence onusienne) qu'Ottawa a signée en 1997, Alger et Djakarta doivent d'être cités dans le rapport américain à « des inquiétudes croissantes quant à la situation du droit de la propriété intellectuelle dans ces pays ».
La Corée du Sud ayant été retirée, cette liste compte désormais l'Argentine, le Chili, la Chine, l'Inde, l'Indonésie, Israël, le Pakistan, la Russie et la Thaïlande ainsi que les trois nouveaux pays, qualifiés de mauvais élèves. Les 12 pays incriminés font l'objet d'une surveillance étroite et pourraient faire face à des sanctions économiques, si Washington portait la cause devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Les États-Unis ont une autre liste, dite de surveillance modérée, sur laquelle figurent 33 autres pays. Washington a des inquiétudes pour les droits d'auteurs américains dans ces pays, mais juge que la menace est moindre. En Algérie, et malgré toutes les campagnes de sensibilisation et des saisies des supports contrefaits et illicitement commercialisés, comme les CD, les DVD, les Divx, les cassettes vidéo et autres produits piratés, le phénomène du piratage reste le plus présent sur la scène « intellectuelle » algérienne. Selon des chiffres avancés par l'Office national des droits d'auteur et des droits voisins, on estime à plus de 600 000 supports qui ont été recensés, l'année dernière, en Algérie. Pour les défenseurs des droits d'auteur, l'urgence est dans la création d'un « comité interministériel » et d'une « police » pour la protection des droits d'auteur. Selon toujours les statistiques fournies par l'ONDA, le phénomène de contrefaçon a causé un lourd préjudice aux droits d'auteur qui se traduit par une perte annuelle estimée, selon une évaluation effectuée en 2004, à 780 000 DA. Pourtant, la législation est claire, avec l'Ordonnance n° 03-05 du 19 juillet 2003 relative aux droits d'auteur et aux droits voisins. Ainsi, les oeuvres littéraires ou artistiques protégées y sont notamment spécifiées à l'exemple des essais littéraires, des recherches scientifiques et techniques, romans, nouvelles et poèmes, les programmes d'ordinateurs, toutes les oeuvres du théâtre, les oeuvres musicales et cinématographiques, celles des arts plastiques et arts appliqués, les maquettes d'œuvres d'architecture, les dessins relatifs à la topographie, les oeuvres photographiques. Bénéficient de la protection spécifique prévue par les dispositions de cette ordonnance les oeuvres du patrimoine culturel traditionnel et les oeuvres nationales tombées dans le domaine public. Quant à l'Office national des droits d'auteur et des droits voisins, il est tenu d'assurer la protection des droits des auteurs ou tout autre titulaire de droits nationaux adhérent et des auteurs ou tout autre titulaire de droits étrangers résidant en Algérie ou non, représentés au moyen d'accord de représentation réciproque avec des organismes étrangers similaires, dès lors qu'une oeuvre ou une prestation de leur répertoire est l'objet d'une exploitation publique. Concernant les sanctions, l'action en réparation du préjudice, résultant de l'exploitation non autorisée de l'oeuvre de l'auteur et des prestations du titulaire des droits voisins, relève de la juridiction civile alors que l'évaluation des dommages et intérêts est fixée conformément aux dispositions du code civil en tenant compte des gains générés par l'atteinte aux droits.
Dvd, CD audio ou Mp3 sont proposés en vente libre dans les rues algériennes et chacun y trouve son goût. Les logiciels d'ordinateurs, également protégés par la loi, n'échappent pas à la contrefaçon pour le plus grand bonheur des initiés. La loi est pourtant sévère contre les contrevenants puisque le coupable du délit de contrefaçon d'une œuvre ou d'une prestation risque de 6 mois à 3 ans d'emprisonnement et d'une amende de 500.000 à un million de dinars que la publication ait lieu en Algérie ou à l'étranger. En cas de récidive, la peine prévue est portée au double.
Source: Le Quotidien d'Oran