Pour M. Mokhtar Aiad, président de l’Association Algérienne des Sociétés de Services et des Editeurs de Logiciels (AASSEL), les opérateurs privés ont été écoutés, lors de l’élaboration du programme E-Algérie 2013, mais tenus à l’écart. D’autre part, le doute se serait déjà installé quant à la mise en application de ce plan ambitieux.
Vous avez contribué à la réalisation du document relatif au programme E-Algérie 2013. Que pouvez-vous nous dire aujourd’hui à propos de ce projet?
En fait, nous avons participé aux débats en rapport avec le projet E-Algérie 2013 mais nous n’avons pas participé à l’élaboration du document final. Nous avons d’ailleurs émis un certain nombre de réserves en ce qui concerne ce projet de manière générale. La première réserve est, bien sûr, liée au fait que les opérateurs du secteur des TIC n’aient pas participé à la réalisation de la mouture finale du document. Ces opérateurs l’ont certes inspiré mais n’ont pas participé à sa rédaction. Après sa finalisation, le document a été mis sur le site du premier Ministre et on nous a proposé alors d’émettre des remarques, mais ce n’était pas une manière de faire très entraînante. Il est vrai que ce projet a été très bien accueilli par les professionnels, car c’est la première fois que l’Algérie dispose d’un plan relatif aux TIC de cette importance, mais nous aurions aimé que les opérateurs soient davantage impliqués. Nous reprochons aussi au document E-Algérie 2013 le fait qu’il comporte trop d’actions et une multitude de détails mais sans priorités précises. Dans ce même plan, il était prévu la mise en place d’un comité chargé de mettre en place le plan directeur du programme E-Algérie 2013 en attendant l’installation d’une structure supposée faire le suivi du programme. Rien n’a été fait de tout cela. L’autre problème rencontré par ce projet est celui des délais d’étude. Le document a été remis au Conseil National Economique et Social en décembre 2009. Il a ensuite été renvoyé au gouvernement entre les mois d’avril et mai. Depuis, aucune action n’a été engagée. Je tiens à préciser, à ce sujet, que le Ministère des PTIC a déployé d’énormes efforts pour réaliser ce projet. Cependant, le doute quant à son aboutissement s’est installé peu à peu. Il y a des administrations qui refusent encore d’acquérir des équipements proposés par des sociétés privées, ce qui est en totale contradiction avec l’esprit du plan E-Algérie 2013.
Où se situe exactement le blocage d’après vous ?
Nous sommes en attente d’une approbation officielle de la part du gouvernement quant à la mise en application de ce plan. Le document relatif à ce plan est entre ses mains depuis plus d’une année déjà. Je vous informe que, d’après une étude réalisée par l’ONU, l’Algérie est aujourd’hui classée à la 131ème place en ce qui concerne la E-administration et à la 148ème place en ce qui concerne les services en ligne. Ce sont des classements qui devraient nous donner à réfléchir. Je vous informe aussi que, depuis quelque temps, nous ne parlons plus d’E-Algérie 2013, mais seulement d’E-Algérie, car il est désormais impossible d’atteindre les objectifs fixés par ce projet d’ici l’année 2013.
Quelles sont, selon vous, les mesures à prendre en priorité pour instaurer une véritable société de l’information en Algérie?
Avant tout, il faut une prise de conscience de la part des plus hautes autorités du pays. Il est également nécessaire de mettre en place une structure chargée de faire le suivi de tout ce qui touche à la généralisation des TIC. Cette structure, supposée être au dessus des Ministères, devrait être constituée de cadres représentant différents Ministères car les TIC touchent tous les secteurs. Je pense aussi qu’il faudrait revoir le programme E-Algérie en limitant le nombre d’objectifs fixés afin que ce soit des objectifs réalisables.
Quelle est la situation du marché des logiciels en ce moment ?
Il existe une demande assez intéressante au niveau de ce marché, mais la situation n’est cependant pas favorable à l’investissement. Les entreprises spécialisées dans le développement de logiciels ne se développent pas très vite car il existe, sur le marché, une certaine instabilité. Les lois algériennes encouragent l’investissement, mais la réalité sur le terrain reste assez difficile. Si rien n’est entrepris pour promouvoir ce secteur, de nombreuses sociétés risquent de fermer boutiques. Je pense que le marché des logiciels en Algérie est véritablement menacé.
Source: N'TIC 42 / MARS 2010