L’Algérie cherche à se protéger contre la cybercriminalité. Un organe de lutte contre ce phénomène transnational verra le jour prochainement, a annoncé hier à Alger Djamel Bouzertini, directeur général du Centre de recherche juridique et judiciaire (CRJJ), en marge du séminaire international consacré à ce fléau.
Cet organe spécialisé et opérationnel sera mis en place juste après la promulgation d’un décret réglementant la lutte contre ce phénomène, qui aura lieu bientôt. La création de cette structure sera accompagnée d’une politique de formation des acteurs de la lutte : les agents de sécurité chargés des enquêtes dans le cyberespace, les magistrats en charge des poursuites et des jugements. La cybercriminalité reste certes moins développée en Algérie, qui demeure parmi les pays qui ne sont pas encore outillés pour l’utilisation à grande échelle des cartes d’accès aux comptes bancaires. Et le haut débit est limité. Selon des chiffres avancés par le PDG du provider privé Eepad, il y a une moyenne de 3000 attaques par mois.
Ces attaques prennent plusieurs formes : piratage de sites web (officiels et privés), vol d’informations, atteintes à la vie privée, propagande subversive et terroriste. Parmi ces attaques, les données fournies par le ministère de la Justice font état d’intrusions dans les fichiers de la Banque d’Algérie et des Douanes nationales par un jeune informaticien d’Oum El Bouaghi, la diffusion de scènes obscènes sur Internet à Rouiba et l’utilisation d’un site web pour écouler des pièces archéologiques à Annaba. Les instances judiciaires ont enregistré douze cas de cybercriminalité en 2010 contre un seul cas en 2005. Cela dénote du développement, certes long, du cyberespace. Et pour y faire face à l’avenir, l’Algérie met en place la législation nécessaire et investit dans la formation des agents en charge de la lutte contre ce fléau qui occasionne des pertes économiques colossales dans le monde. L’Union européenne, par exemple, perd 400 millions de dollars par an dans les cartes de crédit et 12 milliards de dollars dans les attaques de virus. Les pertes moyennes des grandes entreprises françaises sont évaluées, pour 2009, à 2,4 millions d’euros. Ces chiffres donnent une idée sur ce fléau qui risque de prendre de l’ampleur en Algérie avec le développement des réseaux informatiques et l’élargissement de l’utilisation de l’internet et des nouvelles technologies de l’information et de la communication.
Cette nouvelle forme de criminalité transnationale est une menace sérieuse pour les institutions et les entreprises. La cybercriminalité désigne toute activité répréhensible qui utilise ou vise les systèmes et les réseaux numériques. En profitant des faiblesses du système de télécommunication mobile, des experts peuvent espionner légalement les utilisateurs. Il est possible, pour eux, d’identifier les numéros personnels, de connaître les déplacements des utilisateurs et d’écouter les messages vocaux des personnes ciblées. Le téléphone mobile peut ainsi se transformer en véritable espion. Le risque n’est pas très connu, mais le piratage de conversations et de Sms à partir d’un mobile existe bel et bien. La lutte contre ce fléau passe inéluctablement par une coopération avec d’autres pays et organismes transnationaux, à l’instar d’Interpol. Grâce à Interpol, dont elle est membre, l’Algérie obtient des facilités dans l’échange d’informations avec d’autres pays membres, bénéficie d’une assistance technique et établit des partenariats stratégiques avec d’autres organisations internationales. Le contrôle du contenu, notamment celui des réseaux sociaux tels que facebook et YouTube, s’effectue petit à petit en Algérie, souligne-t-on dans un document élaboré par le ministère de la Justice. Cependant, les services de sécurité rencontrent des difficultés à suivre la traçabilité des adresses IP sur les réseaux sociaux internet pour la simple raison que les sites web algériens sont hébergés à l’étranger. D’où la nécessité de la collaboration et de la coopération avec des enquêteurs étrangers.
Source: El Watan