Le matching des sites de rencontre
L’industrie des sites de rencontre est gigantesque et très florissante. Badoo, Meetic, Match, Tinder, eDarling, OKCupid… et maintenant Facebook Dating. Le succès de ces sites vient de la pertinence des choix de partenaires qu’ils proposent. Ces choix sont basés sur des algorithmes de matching très sophistiqués, qui tiennent compte des goûts et des centres d’intérêt de chacun mais également des réponses aux questions posées et d’une pile d’autres informations. Ils prétendent ainsi proposer le partenaire idéal à chacun.
Crush
IBM Crush est un algorithme de prédiction du crime qui permet à la police d’anticiper les problèmes d’insécurité en détectant les foyers potentiels répondants à des patterns d’incidents. Il permet ainsi de concentrer les moyens de la police dans ces zones.
Crush a un avenir prometteur. En effet, là où il a été déployé, il a permis la réduction de la criminalité de 30%.
La NSA
La NSA (National Security Agency appelée ironiquement Not Such Agency) intercepte une quantité phénoménale de données de tous les coins du monde, de sorte que tout dépouillement manuel est impossible. Des algorithmes très puissants qui veillent sur la sécurité des USA permettent la détection d’évènements critiques.
L’Apprentissage Profond
En anglais « deep learning ». C’est très probablement l’algorithme le plus important de ce début de 21e siècle. Celui qui a permis à l’intelligence artificielle de prendre son essor et ouvrir grandes les portes de l’ère de l’intelligence de la machine. Les réseaux neuronaux artificiels existaient depuis plusieurs décennies. L’algorithme du deep learning lui-même existe depuis les années 1980. Mais deux facteurs ont concouru à son essor : d’un côté la puissance de calcul disponible et de l’autre l’émergence du big data. En effet, le deep learing est friand et se nourrit des deux.
L’apprentissage profond dans son principe s’inspire de l’apprentissage dans le monde réel en ce sens qu’il récompense les réponses exactes en renforçant les connexions neuronales qui les conduisent. Le nom deep learning vient du fait qu’il permet de configurer les neurones dans les couches cachées ou profondes, qui se trouvent entre l’entrée et la sortie d’un système.
Mais pour arriver au bout de l’apprentissage et faire converger le réseau, il faut l’alimenter par une quantité faramineuse de données et conduire une somme colossale de calculs. C'est l’avantage des Américains et des Chinois, propriétaires des grandes applications mondiales de communication, génératrices d’une pléthore de data, qui alimente les algorithmes qui finissent par émuler l’intuition et le raisonnement humains et produire des compétences autrefois exclusivement dévolues à l’humain comme la reconnaissance des formes, de la parole et des visages, le diagnostic de maladies, la traduction de textes, le recrutement, la détection des fraudes, ainsi que battre le champion du monde des échecs et du go ! Il se dit néanmoins que les Européens, qui ne sont propriétaires d’aucune de ces grandes applications pourvoyeuses de datas n’ont aucune chance de dominer un jour l’industrie mondiale de l’intelligence artificielle. Que dire alors de l’Afrique !
On est actuellement au tout début d’une ère qui sera complètement dominée par l’intelligence artificielle, où la machine se charge de plus en plus de tâches autrefois exclusivement humaines. Ne pas maîtriser et ne pas avoir de grands opérateurs dans le domaine est quasiment un suicide à très court terme.
High-frequency trading
Depuis longtemps, les transactions boursières sont effectuées non pas par des humains mais par des algorithmes. Ils réagissent à présent à la microseconde pour maximiser les gains de certaines entreprises. Mais il arrive que les algorithmes des différents intervenants rentrent en résonnance et provoquent des montagnes russes dans les salles de cotation. C’est l’un des très nombreux effets de bord des algorithmes dans la vie courante.
Dans l’enfer des algorithmes
De plus en plus, des algorithmes font et défont les choix pour nous. Aujourd’hui déjà, c’est des algorithmes qui décident quel site on consulte pour un thème donné, quelle application on télécharge, quelle musique on écoute, quel est le partenaire de vie idéal ou le candidat idéal pour un poste donné, quel post de quel contact on verra sur Facebook,… Mais les choses iront en s’aggravant, à tel point que chaque jour le doute est plus fort sur le fait de savoir si le monde tel qu’on le connait existera encore dans une décade ou deux.
La data scientist et militante américaine Catherine H. O’Neil met en garde dans son livre intitulé "Algorithmes : la bombe à retardement" contre les dangers d’un monde dominé par les machines et les algorithmes. Le titre original du livre est nettement plus percutant : "Weapons of Math Destruction. How Big Data Increases Inequality and Threatens Democracy”.
Dans le monde des assurances, c’est un algorithme qui fixe votre prime d’assurance en fonction de votre profil de risque, du quartier où vous habitez, de votre situation professionnelle et personnelle,… Dans le système judiciaire américain, c’est un logiciel qui décide de la durée de la peine d’un condamné en fonction de son profil et de sa probabilité de récidive. Et c’est précisément là que ça coince.
Le bon côté de la chose c’est que ce système permet une plus grande objectivité des décisions de justice et limite les possibilités qu’elle soit manipulée puisque un juge doit motiver toute décision de ne pas se conformer aux recommandations de l’algorithme. Mais, si vous venez d’une famille aisée, que vous avez fait des études brillantes et que vous habitez un quartier chic, même si vous avez commis un délit grave comme la conduite en état d’ivresse ou une agression sur une personne, le système va considérer que c’est un accident dans un brillant parcours et décide d’être clément. Alors qu’un pauvre, déscolarisé, habitant dans un ghetto peut subir une peine très lourde pour un vol à l’étalage parce que son profil indique qu’il a toutes les chances de récidiver. En manquant de nuances et de compassion, les algorithmes risquent dans la plupart des cas d’aggraver un état de fait au lieu de le résoudre. Comme on l’a vu avec le trading boursier, les algorithmes sont faits pour maximiser les gains des établissements financiers et des grands bailleurs de fonds au détriment même du citoyen lambda et de l’intérêt général.
Pour dire les choses simplement, c’est donc souvent un moyen pour les puissants de perpétuer leur domination. C’est l’argument principal des détracteurs des algorithmes et du big data.
Lorsque les algorithmes déraillent, cela peut être dramatique comme dans les cas de crashs boursiers ou dans l’accident du véhicule autonome Uber. Mais globalement, nous allons vers un monde où les algorithmes contrôlent de plus en plus nos vies et les choses ne se tasseront pas avec la blockchain. Il est plus que temps que l’algorithmie prenne la place qui lui revient de droit dans nos programmes scolaires.