Paysage audiovisuel en Algérie: de nouvelles chaînes pour séduire les téléspectateurs


Les Algériens vivent ces derniers jours au rythme d’apparition de nouveaux canaux de télévision comme Ennahar TV, Echorouk TV, El Djazairia et El Adala. Ils découvrent l’évasion par le biais des satellites. L’audience de ces chaînes commence à grandir pour contourner le verrouillage de l’audiovisuel en Algérie. Mais que valent ces canaux et vont-ils réellement répondre aux attentes des citoyens ? N’TIC a tenté d’apporter des éléments de réponses.


Diffusée sur NileSat, l’un des satellites les plus populaires en Algérie, El-Djazairia couvrira l’Afrique du Nord, le Proche-Orient et l’Europe. Les programmes de la chaîne seront totalement diffusés en arabe algérien, pour toucher un large public. Elle va essayer de véhiculer un peu de joie de vivre aux Algériens qui sont souvent enfermés dans un cadre de vie morose. Elle va capitaliser aussi sur la mauvaise programmation de l’ENTV, qualifiée de « l’unique », malgré ses autres chaînes qui ne sont perçues que comme des clones.

Pour l’heure, le paysage audiovisuel algérien est composé de cinq chaînes publiques, une terrestre et quatre satellitaires. A travers la grille, Echorouk ambitionne d’ores et déjà de devenir « la première chaîne de télévision des Algériens et des familles algériennes ». Elle axe sur les chansons et le sport pour séduire, en plus des feuilletons turcs et syriens. À terme, la chaîne devrait être dotée d’un « programme diversifié » et diffuser des tranches d’informations, des émissions politiques, religieuses ou sportives ou encore des séries réalisées en Algérie.

Le lancement de la chaîne « El Adala» quant à elle coïncidait avec les législatives de 2012 et se veut, surtout, un support pour promouvoir le nouveau parti de l’islamiste Abdallah Djaballah : le Front pour la Justice et le Développement (FJD). La réception par satellite de programmes télévisés en Algérie a connu une évolution sans précédent ces dernières années. La parabole est devenue un véritable phénomène de société. La vente libre de terminaux numériques indépendants à un prix accessible, parallèlement à l’arrivée d’Internet en Algérie, a bouleversé la donne. « La moitié des téléspectateurs préfèrent les émissions étrangères à l’offre nationale, qu’ils jugent médiocre », constate Jeune Afrique. L’offre en chaînes satellitaires est quasi sans limite, même s’il n’existe pas de données précises sur le nombre de chaînes captées dans les foyers algériens. Il n’y a en effet pas d’enquête de terrain ni de données statistiques en la matière.

« Ce qui est déplorable, c’est le manque d’offre télévisuelle en Algérie », estime un cadre d’une société nationale, tandis que pour un étudiant universitaire de l’ITFC,
l’Algérie « a besoin d’une chaîne d’informations continues afin que les Algériens ne soient pas contraints d’attendre le journal télévisé de 20 heures pour savoir ce qui s’est passé dans la journée chez eux ». Avec l’explosion de l’offre télévisuelle permise grâce à l’essor des nouvelles technologies de diffusion et de réception par satellite, le champ médiatique algérien connait une reconfiguration radicale. La chaîne publique nationale perdit son monopole de diffusion d’images et de contenu.

Le téléspectateur peut désormais inverser les rôles. D’acteur passif, il se transforme en acteur actif pouvant sélectionner ses programmes par la seule grâce de sa télécommande. Il est libre de recevoir les émissions qu’il choisit et de « zapper » quand bon lui semble. La création d’une chaîne de télévision est un projet à mûrir Il y a d’abord la question du financement. Une chaîne de télévision nécessite des moyens financiers très importants. Le retour sur investissement se situe entre sept et dix ans. Il faut ajouter les studios, les caméras, les équipes et tout cela coûte beaucoup d’argent. Il faut former des gens à ces métiers.

Dans un récent entretien accordé à un organe de presse algérien, le patron de Nessma-TV, Karoui Nabil, a indiqué qu’une chaîne de télévision coûtait entre 10 et 50 millions d’euros par an, tandis que le marché publicitaire algérien n’est pas aussi important pour favoriser le fonctionnement d’un aussi grand nombre de chaînes en projet. D’autres spécialistes estiment que le marché publicitaire, évalué à plus de 100 millions de dollars, ne peut pas contenir au-delà de trois chaînes de télévision. L’ouverture de l’audiovisuel a été à maintes fois retardée car elle serait porteuse de dangers auxquels est exposée l’unité nationale, en cas de multiplication de chaînes privées.

Si la télévision est en mesure de rester au centre de nos vies au foyer, c’est avant tout parce qu’elle ne répond plus du tout à la même définition qu’avant, et qu’elle va se consommer très différemment. Les nouvelles chaînes ont été lancées non seulement pour enrichir le contenu mais courent surtout derrière la manne publicitaire de la télévision, toujours énorme par rapport aux autres médias. Entre verrouillage et promesses, les nouveaux entrants doivent trouver un bon modèle économique pour espérer durer. Le groupe El Watan a déjà annoncé au lendemain de l’adoption d’un avant-projet de loi sur l’information consacrant l’ouverture de l’audiovisuel à la concurrence, qu’il postulait pour la création d’une chaîne de télévision et d’une radio.

Dans un communiqué, il a indiqué qu’il déposera un « dossier d’agrément auprès des instances qui seront créées à cet effet ». Le groupe El Khabar a affiché également son intention de créer une « chaîne de télévision et de radio d’information de proximité ». La bataille de l’audiovisuel en Algérie ne fait que commencer…

Kamel RAHMOUNI