Internet : Journaliste, un métier à réinventer

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Le développement de l’outil Internet impose de nouvelles règles de fonctionnement à la presse qui n’a eu de cesse, pourtant, depuis les années 70 de s’adapter à l’usage des nouvelles technologies. Toute la chaîne de la presse s’en trouve, en effet, bouleversée, essentiellement le métier de journaliste, qui voit émerger une nouvelle pratique « le journalisme citoyen », qui lui impose de nouveaux défis.

Le développement de l’outil Internet impose de nouvelles règles de fonctionnement à la presse qui n’a eu de cesse, pourtant,  depuis les années 70 de s’adapter à l’usage des nouvelles technologies. Toute la chaîne de la presse s’en trouve, en effet, bouleversée, essentiellement le métier de journaliste, qui voit émerger une nouvelle pratique « le journalisme citoyen », qui lui impose de nouveaux défis.
Deux faits d’abord, pour poser la problématique  du métier de journaliste ; l'an dernier un photojournaliste professionnel de Reuters avait retouché "frauduleusement" une photo prise au Liban. C'est un blog qui s’est aperçu de la transgression et l'a démasqué. En France, durant les dernières élections présidentielles, le site de journalisme citoyen, rue89.com, a été le seul à oser rapporter que la première Dame de France n'était pas allée voter lors du deuxième tour, alors que plusieurs grands titres de la presse traditionnelle, visiblement informés, avaient préféré taire ce fait. Certains de ces titres se sont, par la suite, subtilement servis du journalisme citoyen, notamment en citant rue89.com comme source, pour reprendre l'information dans leurs colonnes, cette fois sans prendre de risque. Chaîne central dans le monde de la presse, le métier de journaliste subit une véritable révolution imposée par le développement prodigieux des nouvelles technologies  de l’information et, surtout, par l’ascendant que prend le réseau Internet sur l’ensemble des maillons du processus de production, de diffusion, de consommation et de stockage de l’information.
Pourtant le monde de la presse s’est laissé assez tôt tenté par l’intégration des nouvelles technologies. Docteur en sciences politiques, professeur au Département d'information et de communication de l'Université Laval (Canada)  François Demers consacre une analyse éclairée à ce mouvement d’adaptation de la presse, dans une contribution dont des extraits ont été mis en ligne.
Vers la fin des années 1990, Internet s’affirme rapidement comme un nouveau support d’information, à côté de la presse écrite et de la presse électronique, radio et télévision. A sa naissance, il a bénéficié de l’engouement pour les nouvelles technologies et de la flambée des capitaux spéculatifs sur les marchés boursiers, au point que certains sont allés jusqu’à prédire, avec crainte ou enthousiasme, qu’il allait remplacer ou se subordonner totalement les médias « traditionnels » de l’information journalistique.
Dans les salles de rédaction, l'Internet a été introduit comme une nouvelle possibilité de la numérisation des procédés de production. Depuis les années 1980, les journalistes travaillaient sur des ordinateurs, aussi bien pour produire les textes que pour les mettre en page. Dans les salles de presse de la radio et de la télévision, les appareils d’enregistrement et de montage ont graduellement été remplacés par des appareils numériques. Au début des années 1990, la plupart des contenus (écrits, audio et vidéo) étaient désormais numérisés, c’est-à-dire traduits en langage binaire d’ordinateur, en 0 et 1. Peu à peu, avec la mise en place de réseaux télématiques puis du Réseau des réseaux (Internet), les journalistes ont entrepris d’explorer les possibilités offertes par cette nouvelle communication à distance. La majorité a commencé par le courriel ; un grand nombre ont appris à expédier leurs textes et images de l’extérieur vers la salle de rédaction ; quelques-uns se sont même mis à naviguer à la recherche de sites dont ils pourraient extraire des données, des idées ou des angles nouveaux. L'Internet est devenu peu à peu un outil de recherche.

En parallèle, des nouvelles jeunes start up ont développé des sites (Webzines) qui offraient de l’information d’actualité en concurrence aux médias existant hors d'Internet. De leur côté, les entreprises de presse « traditionnelles », découvrant le danger qu'Internet attire leur clientèle, se sont créés des sites où elles publiaient en ligne tout ou partie de leur édition traditionnelle. Le plus souvent, elles se satisfaisaient d’y reproduire les contenus de la version papier. Graduellement, les équipements s’améliorant, les journalistes, aussi bien les nouveaux que les anciens, ont découvert les ingrédients du journalisme en ligne et dessiné un « langage » pour le journalisme en ligne, à base de multimédia, d’interactivité et d’hypertextualité.

A mesure que  l’outil Internet s’impose dans leur vie professionnelle quotidienne les journalistes se retrouvent face à une véritable problématique existentielle ; être dans le mouvement ou ne pas être à la page et disparaître. Un tiers des journalistes américains se « branchaient » régulièrement à la fin de 1996, les deux tiers à la fin de 1998, selon l'enquête menée annuellement, depuis 1994 par Steven Ross, professeur à l'école de journalisme de Columbia, et Don Middelberg, président de la société éponyme de relations publiques de New York. Leurs façons de chercher, leurs carnets d'adresse, leurs spécialisations et même leurs heures de tombée, en étaient affectés à un degré ou à un autre. En même temps, plusieurs milliers de médias avaient mis un pied sur le Net, sinon les deux : leurs façons de rapporter la nouvelle, la qualité et la quantité d'informations produites, leur position face à la concurrence et même leurs partenariats, en avaient été affectés, à un degré ou à un autre.


Et cette évolution ne fait que commencer. A mesure que les journalistes et les médias prendront de l'assurance dans le cyberespace, que le public et les sources d'information s'y feront nombreux et que la technologie se simplifiera, Internet deviendra aussi familier que le téléphone ou les pages jaunes.
Car c'est bien d'un apprivoisement qu'il s'agit. Beaucoup de journalistes ont plongé - ou ont été plongés - dans le réseau informatique sans qu'on ne leur ait jamais expliqué ce qu'ils pouvaient en faire. Ils en sont souvent restés avec le goût amer d'une technologie déshumanisante. Bien des médias ont lancé un site web sans avoir la moindre idée de ce qu'ils allaient en faire. Souvent, ils en sont restés avec le goût amer d'un cyberespace complètement désorganisé. Alors qu'il aurait suffi de consacrer une demi-heure à démystifier le courrier électronique aux uns, une heure à faire découvrir la nature du Web aux autres, et une matinée de navigation et de production à tous, pour que ce vaste ensemble apparaisse soudain moins déshumanisant et moins désorganisé. Et surtout, beaucoup moins complexe qu'il en a l'air.

Depuis l’introduction de l’informatique dans le monde des médias, les différents métiers qui concourent à l’exercice du journalisme connaissent de profondes évolutions et mutations qui touchent tous les maillons de la chaîne de l’information : sources, recueil, traitement, production, diffusion-distribution, « consommation » même et enfin archivage et stockage. L’évolution des techniques, des équipements et des process de traitement révolutionnent les métiers qui font le journalisme. Trois tendances lourdes apparaissent clairement : convergences de certains métiers, avec des redéfinitions de tâches et de fonctions, suppressions ou disparitions de certains autres et, enfin, émergence de nouveaux métiers jusqu’ici étrangers au monde de la presse et du journalisme. Ce sont, d’abord, les métiers les plus techniques qui sont menacés. Où sont passés les typographes ? Les sténos ? Les photocompositeurs ? Les photograveurs ? Les logiciels de correction orthographique (et typographiques pour certains) menacent le métier de correcteur. Certaines rédactions l’ont déjà supprimé. En télé, où est passé le technicien du « mixage » ? Où est passé le « preneur de son » dans l’équipe de tournage vidéo ? Voire le caméraman et le monteur dans celui du JRI (Journaliste Reporter d’Images) ? Les journalistes tournent, montent et mixent eux-mêmes leurs sujets.

Mais le métier le plus touché est, sans doute, celui de SR (secrétaire de rédaction) ? Ce dernier rempart contre la dérive professionnelle est en train de disparaître. Remplacé par une nouvelle fonction, celle « d’éditeur » (ou « d’éditeur visuel », ou même de « directeur artistique » chez certaines rédactions). Son nouveau rôle ? Gérer le processus de l’édition du journal en fonction des prévisions et des pré-maquettes et suivre toutes les étapes du produit jusqu’à sa réalisation finale. De nombreux SR sont en train de redevenir journalistes. De nouveaux métiers émergent : éditeur mais aussi « scannéristes », techniciens du flashage, graphistes, « infographes », iconographes (différent du photographe !), « designers », directeurs artistiques, journaliste « recherchiste » (journaliste formé à la documentation et aux banques de données). Les fonctions passerelles, à cheval sur plusieurs métiers, se multiplient. Il faut désormais avoir plus d’une compétence à la fois. Être plus souple, maîtriser les nouvelles technologies pour garantir son gagne-pain. Accepter de s’acquitter de tâches techniques qui étaient dévolues à l’atelier. Accepter d’évoluer dans le métier en changeant de poste et de fonctions…
Les entreprises de presse sont confrontées à de douloureux diagnostics internes, au plan humain et matériel, et à des stratégies à mettre en place face aux nouveaux défis technologiques.
Au moment où la presse fait face à ce mouvement d’expansion des outils technologiques, Internet ouvre un autre front en permettant l’émergence d’un nouveau journalisme appelé le « journalisme citoyen ».
Le journalisme citoyen, lit-on sur le site de l’encyclopédie en ligne Wikipedia, est un aspect particulier du média citoyen qui est l'utilisation des outils de communication, notamment ceux apportés par Internet (site web, blog, forum, wiki...), par des millions de particuliers dans le monde comme moyens de création, d'expression, de documentation et d'information. Il y a un certain renversement dans ce domaine, le citoyen passant du rôle de simple récepteur à celui d'émetteur, devenant lui-même un média. Le journalisme citoyen peut être défini comme l'action de citoyens « jouant un rôle actif dans les processus de récupération, reportage, analyse et dissémination de l'actualité et de l'information », selon le rapport We Media : How Audiences are Shaping the Future of News and Information de Shayne Bowman et Chris Willis. Ceux-ci ajoutent : « Le but de cette participation [des citoyens] est de fournir les informations indépendantes, fiables, précises, diverses et appropriées nécessaires à une démocratie ». Le journalisme citoyen consiste généralement à fournir un moyen d'expression à des citoyens ordinaires, y compris des représentants des franges les plus marginales et sous-représentées de la société. Le développement du Web, et notamment de plates-formes de publication faciles d'usage, ont accéléré la tendance et permis l'apparition de nombreux sites Web donnant la parole à des citoyens ordinaires ou des militants profitant de ce nouveau média : « En offrant des plates-formes techniques accessibles à tous, les blogs et wikis autorisent ce que nous appelons le ‘‘journalisme citoyen’’, par ce biais nous pouvons tous passer du statut de lecteur à celui de rédacteur, de commentateur des événements. Position éminemment satisfaisante.
Le journalisme citoyen est devenu un média prisé notamment pour l'information de proximité, se concentrant sur une ville, parfois même sur un quartier, pour donner un éclairage différent à la vie d'une communauté dont certains membres s'estiment ignorés par les médias existants ou délaissés par les institutions locales. La plupart des courants de pensée ont également recours à ces possibilités, parfois de façon organisée sous forme de tribune plus que spontanément citoyenne. Certains sites se réclamant comme « citoyens » ont une coloration résolument engagée politiquement ou polémique. De même, on compte parmi les médias altermondialistes des sites se revendiquant du journalisme citoyen comme par exemple le collectif Indymedia. Une plate-forme qui a dorénavant fait ses preuves, et qui permet à tous de prendre librement la parole, en publiant lorsqu'ils le souhaitent leurs articles, comme par exemple sur le site iSubway. Le fait que de nombreux « journalistes citoyens » sont souvent des militants pour une cause ou une idéologie particulière a soulevé des critiques.


De nombreux médias traditionnels accusent nombre de partisans du journalisme citoyen de manquer de l'objectivité nécessaire à la pratique du journalisme. Le journalisme citoyen a aussi été critiqué récemment dans le domaine universitaire, notamment par Vincent Maher, dirigeant du New Media Lab de l'Université Rhodes, qui a souligné plusieurs faiblesses parmi les revendications des journalistes citoyens, qu'il résume comme « the three deadly Es : ethics, economics and epistemology » (les trois ‘‘E’’ fatals : éthique, économie et épistémologie). Cet article a été largement critiqué par la presse et la blogosphère.
Même les partisans les plus ardents du journalisme citoyen en reconnaissent les faiblesses et les limites : « L’avantage, c’est qu’un citoyen journaliste sera capable de publier quelque chose qu’un journal aura peur d’imprimer. L’inconvénient, c’est que la vérification des faits se fait après publication », explique un expert averti de la question.

Pas que  des avantages !

L'impact sur le métier est attesté, entre autres, par une récente étude de l'Organisation internationale du travail à Genève, qui souligne combien le journalisme subit une profonde mutation depuis l'arrivée des nouvelles technologies de l'information et de la communication. Le rapport explique notamment que les NTIC utilisées dans les salles de rédaction entraînent un nivellement (par le bas, bien sûr) des domaines d'intervention des journalistes salariés permanents et des collaborateurs occasionnels. Elle met en exergue le fait que la productivité du travail des journalistes induite, permise et encouragée par les NTIC, nuit à la qualité de la réflexion sur l'information. Elle identifie la surabondance d'informations comme étant devenue le risque majeur pour les journalistes noyés sous les communiqués, les spams, les points de recherche et les références multiples.

Internet forme l’opinion !

L'internet est le média qui a le plus d'"influence" sur les consommateurs, loin devant la télévision, la radio ou la presse écrite, affirme une étude réalisée en France, au Royaume-Uni et en Allemagne par l'agence de communication Fleishman-Hillard et la société d'étude Harris Interactive. Selon cette enquête, internet a une "influence" particulièrement importante dans la prise de décision autour des voyages (billets de train ou d'avion, réservation d'hôtel), des biens culturels (achat de livres, de CD, de DVD) mais aussi du matériel high tech (achat d'appareils photos numériques, de lecteurs MP3, d'ordinateurs portables). En revanche, son influence est nettement plus faible lorsqu'il s'agit de voter pour un candidat à une élection ou d'acheter un produit pour la santé. L'étude a été réalisée en ligne entre décembre 2007 et janvier 2008 auprès de 4.900 consommateurs français, britanniques et allemands, sélectionnés selon la méthode des quotas. A partir de cette enquête, l'agence américaine Fleishman-Hillard, en collaboration avec Harris Interactive, a bâti un nouvel outil d'analyse, l'Indice d'Influence du Numérique (IIN). "L'influence" des médias est définie comme une combinaison du temps consacré par les consommateurs à chaque média et de la place qu'ils y accordent dans leur processus de décision.

Source: El Moudjahid