L'an 1 de la 3G : le bilan et les perspectives

Numéro dossier: 93

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3G : ce qu’en pensent les Algériens

 

La 3G, plusieurs algériens l’ont déjà essayée. Si certains l’ont adoptée, d’autres émettent des réserves et évoquent la qualité du réseau, la lenteur d’une connexion censée être plus rapide que l’ADSL et le coût élevé.

« Je ne suis pas très content de la clé Ooredoo, censée accepter la 3G, mais qui n’a pas de réseau 3G à proprement parlé », reproche Mohammed, 32 ans.

De son côté, Wahab, 24 ans, un abonné de Djezzy, évoque la qualité du débit en mettant l’accent sur la lenteur de la connexion. « Lorsqu’on m’a parlé de 3G, j’étais rassuré, je me voyais déjà capable de télécharger plus rapidement et de visionner des vidéos. Mais là franchement, je suis déçu. La qualité du débit laisse à désirer et puis le coût est très cher », précise-t-il.

« Je crois que les opérateurs doivent améliorer la qualité de service car nous sommes encore très loin par rapport à d’autres pays », poursuit Mehdi, 26 ans.

Certains abonnés 3G parlent carrément de publicité mensongère en dénonçant des prestations de qualité médiocre. « Je ne comprends pas comment certains opérateurs vous parlent de 3G et de débit très rapide quand vous arrivez à peine à surfer sur Internet ou à télécharger des PDF », se plaint Nayla, 30 ans.

Amel la rejoint sur ce point en affirmant qu’il ne peut pas y avoir de 3G sans réseau 3G. « Une clé 3G++ sans le réseau 3G ne vaut rien. C’est comme acheter une voiture sans moteur ! Les smartphones sont tous équipés de 3G, voire 4G de nos jours , et 60% des Algériens possèdent des smartphones et nous avons encore des difficultés pour nous connecter », déplore-t-elle.

De son côté, Ahmed met l’accent sur le caractère inaccessible de la 3G pour un usage fréquent. « Vu les prix, à 1 000 dinars en moyenne les 750 Mo de données consommables, la 3G ne peut pas être utilisée de façon quotidienne. On ne peut se permettre qu’une consultation d’environ une heure par jour avec streaming et téléchargements modérés ».

Pour sa part, Walid, informaticien, 29 ans, affirme que les Algériens ont de l’internet très limité pour l’équivalent de 10% de leur salaire contrairement aux pays occidentaux.


Et qu’en pense Roslane Bencharif, professionnel en télécoms ?

 

Près d’une année après le lancement de la 3G en Algérie, il nous est déjà possible de dresser un bilan plutôt positif dans l’ensemble, même si quelques lacunes (parfois à tort) se font ressentir par le grand public. La 3G, c’est d’abord de la data mobile, donc une solution créée pour répondre à une problématique de mobilité.

En Algérie, comme au sein de la majorité des pays en voie de développement avec un taux de pénétration d’Internet (à domicile) très bas, cette technologie se positionne dès son lancement comme un substitut de l’ADSL (on ne parle pas encore de fibre), sauf que n’obéissant pas au même business model que l’ADSL (pas de forfait en illimité). Bien que cette technologie offre une nouvelle alternative pour accéder au web, son utilisation va forcément être différente et donc influencer les habitudes de consommation des utilisateurs finaux.

Nous pouvons l’analyser à travers les 3 points suivants :

- Le prix. Bien que des prix très attractifs soient appliqués par l’ensemble des opérateurs proposant des services 3G, tous sont conditionnés par deux éléments poussant à la consommation et qui n’existent pas avec les forfaits ADSL : le temps de disponibilité de la connexion (1 jour / 2 jours / 1 semaine / 1 mois, …), et les quotas de data vendue (100 Mo, 200 Mo, 500 Mo, 1Go, 2Go, …). Cela implique que nous devons consommer le quota acheté dans le temps qui nous ait donné pour le faire. Autrement, il est « souvent » perdu.

Cela dit, le plus souvent, on finit par consommer la totalité du quota acheté bien avant l’écoulement du temps imparti pour le faire. C’est aussi la raison qui pousse la majorité des utilisateurs à basculer vers le premier réseau WiFi auquel ils ont accès même si le débit est moins élevé que leur connexion 3G.

- La diversification des terminaux d'utilisation. Avec l’ADSL, nous étions tous connectés sur notre PC et/ou laptop. Nous allions sur Internet souvent pour faire des recherches, chatter, télécharger (on y reviendra sur le troisième point), ou encore simplement consulter nos e-mails. Avec l’avènement des smartphones et autres tablettes, l’utilisation devient certes moins complexe mais bien plus vorace en termes de quantité de data consommée. En effet, il ne s’agit plus de naviguer simplement mais de télécharger des applications, de les mettre régulièrement à jour et certaines d’entre elles ne fonctionnent que
connectées.

Si avec l’ADSL la question de quantité de données consommées ne se pose même pas, notre mode de consommation était différent car nous passions 3 à 4 heures sur notre PC une fois à la maison, souvent en mode multitâches avec un nombre incalculable de fenêtres ouvertes. Avec les smartphones et tablettes, bien que nous utilisions notre téléphone sur de petits laps de temps, les applications que nous utilisons restent souvent connectées même lorsque nous n’utilisons pas notre smartphone ou tablette et nous nous retrouvons souvent à avoir épuisé notre forfait sans même avoir l’impression d’en avoir réellement profité ! Notre mode de consommation a changé !

- Le piratage. Comme au sein de la majorité des pays en voie de développement, le piratage fait rage. Combien de personnes que vous connaissez achètent encore leurs musiques et/ou leurs films ? Quand bien même ils les achèteraient, nous savons tous comment les CD et autres DVD vendus dans le commerce sont fabriqués. LE TELECHARGEMENT de multimédias est l’un des sports favoris de nos internautes (taux de piratage en Algérie : 84% !). Il n’est possible qu’au travers d’une connexion ADSL car bien que le débit soit relativement lent, il reste illimité. Le coût par multimédia téléchargé n’en est que plus bas.

La conclusion est que les différentes technologies proposées ont encore de beaux jours devant elles en Algérie comme partout dans le monde. Beaucoup avaient prédit la mort des réseaux 2G avec l’avènement de la 3G puis de la 4G et pourtant plus de 60% de la population mondiale ayant accès à un réseau de téléphonie mobile le sont en 2G.

Les technologies sont créées et améliorées afin de nous permettre à tous de converger vers ce nouvel univers virtuellement connecté de la manière la plus simple. Mais l’objectif principal reste la rentabilité et chacun devra être capable d’accéder à cet univers à travers la technologie à laquelle son budget lui permet d’accéder, mais personne ne sera jamais exclu.